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Heures sombres en attente d'une éclaircie

Publié le par L'ours

Nous sommes au fond du trou. En ces claires heures de l'été, la lumière ne nous parvient plus. Le trou noir. Un camion lancé un soir de liesse, conduit par un individu qui ne présente aucun signe de radicalisation religieuse, dont le passé immédiat tendait même à faire imaginer qu'il était impie à l'islam aura suffi à nous plonger dans l'obscurité la plus totale. D'un coup d'un seul, on ne se figure plus d'avenir, du moins plus d'avenir tel qu'on le rêvait. On a beau réfléchir, nulle solution n'apparaît.

Après les déclarations éhontées de leaders de droite qui mêlent le combat électoral à l'indignation face au crime terroriste, ce qui ne les grandit pas, se font entendre dans la population les cris de haine à l'encontre d'un gouvernement qui ne semble pas à la hauteur de la tâche. Sommes-nous en train de perdre la raison ?

Face à l'extrémisme religieux dont on a le sentiment qu'il s'étend, sans qu'il soit possible de le contrôler, voire même parfois de l'identifier, monte un autre extrémisme, insidieux, à bas bruit. Pour combattre le premier – l'éradiquer ? – en viendra-t-on à se jeter dans les bras du second ?

Le gouvernement parle de faire appel à la réserve citoyenne. L'Etat d'urgence dont on nous dit qu'il a davantage pour effet de tranquilliser la population que de la protéger a été prolongé de six mois tandis que les champions de l'opposition appellent pour certains à la création de centres de rétention pour des individus qui ne sont que suspectés, pour d'autres l'interdiction du salafisme sur notre sol, d'autres enfin estiment qu'il est de première nécessité de permettre aux gens de s'armer.

Les militants pour les droits de l'homme se méfient, crient à l'abandon de la démocratie, craignent l'état policier. D'autres, arguant du fait que l'assassin de Nice mangeait du porc, buvait de l'alcool, ne fréquentait pas la mosquée, il ne peut s'agir de terrorisme "islamique", mais de l'acte d'un désespéré psychopathe, d'autres, enfin, persistent à affirmer que Daech n'a rien à voir avec l'islam.

Vains remparts ici contre une guerre civile que l'on craint de plus en plus voir arriver, là de s'y préparer comme si elle était inéluctable. Déni, angélisme et naïveté versus bellicisme, autoritarisme, amalgame.

Aucune suggestion entendue ici ou là, quelle que soit son classement sur l'échelle sécuritaire ne parvient à nous convaincre ni ne nous fait entrevoir l'ébauche d'une solution. Aucun de ceux qui, en réaction à l'attentat meurtrier, surenchérissaient en critiques, attitude martiale et proposition surréaliste (Henri Guaino imaginait armer les policiers de lance-roquettes !) ne réussit à nous persuader qu'il détient la clé du problème.

Attendons-nous l'homme providentiel ? Croire, encore ! Pensée magique. Mais l'espoir se nourrit-il d'autre chose ? En économie, on attend un Roosevelt, face à l'idéologie Daesh, un Churchill, pauvres de nous, nous n'avons même pas un De Gaulle !

Daech ne semble plus être cette entreprise terroriste organisatrice et commanditaire d'attentats sur les territoires démocrates qu'elle veut détruire, mais une marque qu'adoptent ceux qui nous haïssent. C'est donc cette haine raciste et ordinaire qu'il conviendrait de débusquer avant qu'elle ne s'exprime de façon dramatique, tout en continuant de combattre Daech. Vaste programme, surtout si pour ne pas l'attiser, la développer il faut se prémunir d'être à notre tour haineux et racistes, ce qui ne semble pas être à l'ordre du jour. Si nous voulons vivre dans un pays où règnent la démocratie, la paix et la justice, notre société – c'est-à-dire chacun de nous – doit veiller à ce qu'elle soit intransigeante en matière de démocratie, de paix et de justice.

Tant que nous sommes vivants, il faut continuer à vivre.

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C
Parfait, comme toujours ! Des propos justes, réfléchis, comme on aimerait en lire dans les médias...
Répondre
L
Merci mille fois.