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Manque d'instruction

Publié le par L'ours

L'idée du jour, dont on nous dit  qu'elle garantirait une meilleure justice, serait la suppression du juge d'instruction, selon les préconisations du rapport Léger remis aujourd'hui à mâme Mam, qui raide comme la Justice dont elle a la charge ministérielle trouve inadmissibles et insultantes les critiques portées à cette réjouissante décision incluse dans la réforme de la procédure pénale.

Les procureurs seront les seuls à diriger les enquêtes, ce qui constituait le travail du juge d'instruction qui "instruisait" les affaires devant aboutir à une décision de justice, c'est-à-dire "faire tout acte utile à la manifestation de la vérité". Donc en principe diligenter une enquête. Ces juges d'instruction étaient saisis par le Ministère public (parquet), composé de magistrats (procureur général, procureur de la République) il est chargé de défendre les intérêts de la Société, donc se réfère à la loi, toute la loi, rien que la loi. Loi votée par le législateur (députés et sénateurs issus du suffrage universel). Mais le système des parquets comprend une hiérarchie très forte. Les parquets de chacune des juridictions de première instance sont soumis au parquet général dépendant lui-même du ministère. Le garde des sceaux disposant lui-même d'un pouvoir disciplinaire sur les membres d'un parquet.

Le juge d'instruction avait mission d'instruire à charge et à décharge, c'est-à-dire que si suspect il avait dans son collimateur, il devait rechercher les éléments prouvant sa culpabilité comme ceux prouvant son innocence, dans un délai raisonnable (deux ans avant qu'il ne rende une ordonnance motivée de la durée de son action) et par tous les moyens mis à sa disposition (énormes). Nommé par le parquet, il fallait contrebalancer le pouvoir de ce dernier en donnant l'indépendance au juge d'instruction concernant son enquête.

Un juge d'instruction qui aurait reçu de la part d'un quelconque pouvoir des pressions, des directives, des ordres interférant avec son enquête aurait effacé dans le marbre gravé de nos Palais le terme de Justice.

La réforme de la procédure pénale comprend donc la suppression du juge d'instruction. On a vu avec l'affaire Outreau, que cette charge avait connu quelques manquements, d'ailleurs l'argument massue revient sans cesse pour étayer cette idée. Le juge d'instruction avait tant de pouvoirs que l'outrageant Outreau fut rendu possible.

Remplacer dans le rôle d'enquêteur numéro 1 le juge d'instruction par un procureur, c'est avoir la possibilité, pour le pouvoir politique en place, d'intervenir dans une enquête. C'est s'assurer que de petits juges fouineurs n'aillent pas investiguer trop loin dans des affaires qui inquièteraient ledit pouvoir en place ou des proches. Mais émettre l'idée qu'une telle chose puisse arriver semble inadmissible et insultante à notre garde des sceaux. Notre république est trop vertueuse.

Si on craint qu'un juge d'instruction ne mène ses investigations, buté qu'il est, qu'à charge, pourquoi ne pas nommer deux juges d'instruction, l'un qui instruirait à charge, l'autre à décharge ?

Et d'ailleurs, c'est bien connu, trop d'instruction nuit.

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